Alors que la ligue reine du basket mondial vient de reprendre ses droits outre atlantique, j'ai comme un sentiment de lassitude envers cette entité qui m'a tellement fait vibrer. J'ai de plus en plus de mal a regarder et à m'intéresser à ce produit qui pourtant n'a jamais été aussi attractif et compétitif. C'est pour ça que j'ai essayé via cette série d'article de comprendre comment la NBA était devenue ennuyeuse.
Plus de rivalités, ou sont passées les 80s/90s ?
Depuis les années 80, la NBA a profondément changé, en grande partie en raison de l'évolution des relations entre les joueurs. À l'époque, des rivalités féroces faisaient vibrer les fans et galvanisaient les équipes. L’exemple emblématique reste celui de Larry Bird et Magic Johnson. Leur opposition, à la fois personnelle et emblématique des tensions historiques entre les Lakers et les Celtics, a marqué le basket et sauvé la NBA. Dans les années 70, la ligue souffrait d’une mauvaise image et d’un manque de spectateurs, mais l’affrontement acharné entre les deux superstars, dans un contexte de rivalité raciale et culturelle sous-jacente, a redonné à la NBA une place de choix dans le cœur des fans américains et même au-delà.Ce duel Bird-Magic, opposant deux personnalités aussi talentueuses que différentes, transcendait le sport. Ils se sont rencontrés pour la première fois en finale NCAA, Magic remportant le championnat universitaire contre Bird. En NBA, cette rivalité a trouvé son apogée lors des finales de 1984, 1985, et 1987, où les deux hommes se battaient pour chaque point, chaque possession. Leurs équipes n'avaient pas seulement une rivalité sportive; elles se méprisaient profondément, tout comme leurs supporters respectifs. C’était cette haine et cette détermination qui donnaient aux matchs un caractère unique, quelque chose que le public adorait. Cela a également inspiré d'autres joueurs à adopter un esprit de compétition intense, créant des affrontements historiques.
Aujourd'hui, cet esprit de rivalité a laissé place à un climat d'amitié et de camaraderie. Beaucoup des superstars actuelles se connaissent depuis le lycée ou les camps d'entraînement et ont noué des relations d’amitié avant même de devenir professionnels. Ils s'entraînent ensemble durant l'intersaison, font des collaborations commerciales et montrent un respect quasi-fraternel sur le terrain. Cette approche, bien que saine et positive en un sens, retire en partie la tension qui électrisait autrefois les grandes rivalités. Les affrontements ne sont plus aussi intenses, et la "haine sportive" semble s’effacer. De plus, l'ère des réseaux sociaux amplifie cette amitié publique entre les stars. Les fans voient leurs joueurs favoris partager des photos ensemble, échanger des plaisanteries et se congratuler mutuellement. Cette dimension digitale a renforcé la perception d’une NBA "lisse", où les stars s’affrontent sans ressentiment. Les rivalités entre équipes semblent également s’être adoucies. Même les finales récentes, comme Warriors contre Cavaliers, bien qu’intenses, manquaient de ce conflit pur et brut qui caractérisait l’époque Bird-Magic.
En somme, la NBA actuelle est marquée par une amitié et un respect mutuel entre les stars, contrastant fortement avec les affrontements légendaires des années 80. Cette évolution a apporté des aspects positifs, mais le manque de rivalité féroce laisse beaucoup de nostalgiques sur leur faim. L'époque des Bird et Magic avait donné naissance à une passion que la NBA peine à retrouver aujourd'hui.
Médiatisation et image des joueurs
Depuis quelques décennies, les joueurs NBA ont complètement redéfini leur rôle et leur image au-delà du terrain. Si autrefois les athlètes se contentaient de performer sur le parquet, aujourd'hui ils sont devenus de véritables chefs d’entreprise, prenant soin de leur image publique et investissant massivement dans divers projets. Cette transition, devenue une norme, illustre à quel point la NBA a évolué : le joueur moderne n'est plus uniquement un sportif, mais aussi une marque à part entière.
À la base de cette transformation se trouve la prise de conscience que la carrière d'un athlète est limitée. Pour certains, leur présence dans la ligue ne dure que quelques saisons, et même pour les superstars, il est rare de jouer au plus haut niveau plus de 15 ans. Ainsi, dès leur entrée en NBA, les joueurs cherchent désormais à bâtir un empire qui leur assurera une sécurité financière et une reconversion post-carrière. LeBron James, par exemple, incarne cette approche moderne : non seulement il est l'un des plus grands basketteurs de tous les temps, mais il est également devenu un magnat du business, ayant investi dans des entreprises de médias (SpringHill Company), de production audiovisuelle, ainsi que dans l'immobilier et la restauration. Son succès inspire une nouvelle génération de joueurs qui voient en lui le modèle d'une réussite sportive et entrepreneuriale.
Pour y parvenir, l’image est cruciale. Les athlètes NBA sont conscients qu’une réputation impeccable ouvre des portes et permet de tisser des liens avec des marques de prestige. Il suffit de voir le cas de Michael Jordan, dont le partenariat avec Nike dans les années 80 a redéfini le potentiel de sponsoring pour les sportifs. Aujourd'hui, les joueurs se battent pour des contrats avec des marques de mode, de technologie, ou même des entreprises liées aux nouvelles technologies comme les crypto-monnaies et le Web3. En soignant leur image, les stars augmentent leur valeur commerciale et renforcent leur attrait pour les investisseurs.
Cependant, les réseaux sociaux ont imposé une transparence inédite. Aujourd'hui, chaque action, chaque mot est scruté et peut avoir des répercussions immenses sur la réputation et le potentiel d'un joueur à attirer des sponsors. En conséquence, la plupart des stars de la NBA travaillent avec des équipes de conseillers en communication et des experts en réseaux sociaux pour maîtriser leur image publique. Des joueurs comme Stephen Curry ou Giannis Antetokounmpo représentent parfaitement cette gestion moderne et réfléchie de la réputation. Respectueux, engagés dans des œuvres de charité, ils véhiculent une image de modèles de réussite et d'inspiration.
Cette gestion de l’image sert aussi de tremplin pour préparer l'après-carrière. Un joueur qui a bâti une marque forte durant sa carrière aura plus de facilité à se reconvertir dans divers domaines, que ce soit en tant qu'analyste sportif, investisseur, ou même propriétaire d'équipe. La reconversion est donc envisagée bien plus tôt que par le passé, et cette stratégie de branding personnelle y contribue énormément. Kevin Durant, par exemple, s’implique activement dans les startups et les technologies, en devenant un investisseur influent dans la Silicon Valley. Chris Paul, quant à lui, a investi dans plusieurs entreprises et cultive une image de leader et de militant, notamment pour des causes sociales. Cela montre à quel point les joueurs actuels sont conscients de leur potentiel d'influence bien au-delà du basket.
Enfin, cette évolution a un impact direct sur l'image globale de la NBA elle-même, qui se présente désormais comme une ligue ouverte sur le monde, éthique, et proche de la réalité quotidienne de ses fans. La ligue encourage même cette dimension entrepreneuriale, y voyant une occasion de faire de ses joueurs des ambassadeurs influents qui redéfinissent les stéréotypes autour des athlètes. Les initiatives comme le NBA Player Association’s Financial Literacy Program ou les programmes de mentorat entrepreneurial sont d’ailleurs mis en place pour soutenir cette vision.
En conclusion, les joueurs NBA actuels sont bien plus que des sportifs : ils sont des entrepreneurs, des investisseurs et des influenceurs. En contrôlant leur image avec une attention constante, ils s’assurent de pouvoir transcender leur carrière sportive pour devenir des figures majeures dans le monde des affaires, du divertissement et de la société. Cette stratégie de branding et d’investissement représente aujourd'hui une dimension essentielle du parcours d'un joueur NBA moderne, et elle est là pour rester.
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